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Le Journal politique de Leunamme
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19 mars 2013

Débat entre Patrick Cohen Frédéric Taddéi : les deux ont raison et tort !

Ca commence par un désaccord entre deux journalistes exprimé à l'antenne sur une émission de France 5. Certains ont qualifié cela de clash,le mot est exagéré, les propos sont restés en permanence courtois et polis. En résumé, c'est Patrick Cohen, l'excellent animateur de la très bonne matinale de France Inter qui reproche à Frédéric Taddéi, le non moins excellent animateur de "Ce soir ou jamais" sur France télévision, d'avoir parfois des invités connus pour leurs idées iconoclastes, voire contraires à la loi. Le second a répliqué que travaillant sur le service public, il n'était pas en droit de décider ce qui était valable ou pas comme idées. Sur ce Patrick Cohen a reconnu que dans son émission il s'interdisait de recevoir certaines personnes pour ne pas propager leurs idées qu'il juge dangereuses.L'histoire en serait restée là, si Daniel Schneidermann n'avait pas interpellé Patrick Cohen sur son billet qu'il publie dans Libération en l'accusant de faute professionnelle. Pour lui, le journaliste de France Inter aurait implicitement reconnu qu'il avait en quelque sorte une liste noire d'invités et pratiquerait donc une sorte de censure sur certains invités dont il ne partage pas les idées. Bref, à partir de là l'histoire a fait un véritable buzz médiatique.

On pourrait se dire qu'il ne s'agit là que d'un épiphénomène, que tout cela n'est encore que de l'écume, un moyen trouvé par deux journalistes pour faire parler d'eux comme cela arrive trop souvent malheureusement. Je pense que non, et j'ai trop de respect pour les deux protagonistes (les trois si on rajoute Schneidermann) pour seulement imaginer qu'il en soit ainsi. Non, il me semble que le débat qu'ils ont eu est un vrai débat qui pose une question fondamentale dans notre démocratie : la place de la diversité des opinions dans les médias.

Au premier abord, la position de Taddéi attire la sympathie. Chez lui, toutes les opinions ont leur place à partir du moment il n'y a pas de propos contraires à la loi, évidemment. C'est ainsi qu'ont été invités Alain Soral, Dieudonné mais encore Bernard Stiegler ou bien d'autres encore qui la plupart du temps ne sont invités sur aucun plateau. C'est vrai que c'est pour cela que son émission est la plus transgressive du PAF (Paysage Audiovisuel Français). C'est vrai qu'il y règne un petit sentiment de liberté qui n'est pas sans rappeler les émissions de Michel Polac. Pour autant, cela me pose un double problème. D'abord on ne connaît pas la position du journaliste, or c'est pourtant lui qui pose les questions et dirige l'émission. Surtout, et c'est plus ennuyeux, il donne la même importance à toutes les idées, or certaines sont parfois ultra-minoritaires voire parfois farfelues. Du coup, ce qui peut parfois ressortir de son émission, c'est un brouillage des idées. Il reste cependant qu'elle a le mérite de n'ostraciser personne.

En ce qui concerne Patrick Cohen, il est facile de crier avec les loups et de le vilipender parce qu'il pratiquerait la censure. La situation est bien plus complexe et subtile que cela. En affirmant qu'il y a des personnes qu'il refuse d'inviter, Patrick Cohen ne censure pas, il affirme seulement une simple vérité professionnelle que l'on n'entend jamais : à France Inter et plus particulièrement dans sa matinale il y a une politique éditoriale, et c'est au nom de cette politique éditoriale que les choix se font et qu'il est donc dans son droit d'inviter ou pas qui il veut.

Le problème, c'est qu'à France Inter comme dans la quasi totalité des émissions de la télévision ou de la radio, cette politique éditoriale n'est pas connue du grand public. Ce qui la remplace, c'est cette idée sous-jacente, plus ou moins suggérée, que les présentateurs, les animateurs, sont objectifs, neutre. C'est évidemment impossible et n'importe quel présentateur ou journaliste, à partir du moment où il s'exprime défend un point de vue ou une position, la sienne ou parfois celle de son employeur. D'où parlent-ils, quelle est leur position ? La plupart du temps, les auditeurs ou téléspectateurs l'ignorent sauf peut-être pour les éditorialistes.

Pourtant, si on regarde la presse écrite, chacun sait que lire "Le Figaro" ou "L'Humanité", ce n'est pas pareil. qu'entre "Politis", L'Express" ou "Le Canard Enchaîné", les idées défendues, le ton pour les exprimer sont différents. Même s'il est mis à mal ces derniers temps, le pluralisme existe dans la presse écrite. A la télévision il est complètement absent, quant à la radio, il n'y a, à ma connaissance que deux émissions qui affichent clairement la couleur, celle, modeste et gèniale, de Daniel Mermet sur France Inter, et celle d'Eric Brunet sur RMC. C'est tout ! On pense ce que l'on veu de chacune de ces deux émissions, mais au moins, on sait ce qu'on écoute.

P.S. : Pour terminer ce billet un peu plus long que d'habitude, je voudrais revenir sur des propos tenus par Frédéric Taddéi. Selon lui, le fait d'être sur le service public lui donne des obligations comme celle de ne pas choisir ses invités en fonction de ses sympathies. C'est juste. Il oublie cependant qu'en France les télévisions et certaines radios privées sont soumises à un cahier des charges et qu'elles ont donc les mêmes obligations.

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Commentaires
C
pas trop de temps pour tout regarder en ce moment.. mais c'est noté!
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